Se représenter soi-même devant les tribunaux – Une bonne idée?
Selon le Code de procédure civile, les personnes physiques peuvent agir pour elles-mêmes devant les tribunaux sans être représentées. Il n’en demeure pas moins que les règles de la procédure établies par le Code et les règlements s’appliquent à tous, sans exception. Est-ce donc une bonne idée de se représenter soi-même?
Avant de vous lancer seul dans un processus judiciaire, avez-vous pensé aux délais de rigueur, aux risques de non-conformité des actes de procédure? Pour éviter des situations fâcheuses et coûteuses, il est fortement recommandé d’avoir recours aux services d’un avocat. En étant représenté par un avocat en litige, vous vous éviterez énormément de soucis et aurez la certitude que votre processus sera pris en charge avec sérieux et professionnalisme tout au long de son déroulement.
Un exemple récent – L’affaire Légaré c. Turcotte
Dans l’affaire Légaré c. Turcotte[1], la Cour du Québec traite justement de plusieurs défauts relativement aux exigences du Code de procédure civile.
Dans le cas en l’espèce, monsieur Légaré (le demandeur) a décidé de se représenter soi-même et a intenté un recours judiciaire contre madame Turcotte (la défenderesse), qui était, quant à elle, représentée par avocate.
La procédure étant plutôt complexe, une personne non représentée par avocat telle que monsieur Légaré se retrouve dans une position risquée. Plusieurs étapes doivent être complétées, ce qui multiplie la chance de faire des erreurs lorsqu’on ne s’y connaît pas et qu’on décide de se représenter soi-même. Examinons donc les éléments de procédure discutées dans ce jugement et voyons ce qui s’est passé dans le cas de monsieur Légaré.
Les irrégularités procédurales
Ce qui est prévu dans la Loi : Le Code de procédure civile impose notamment aux parties à une instance de coopérer pour établir le protocole de l’instance à être examiné par le tribunal. De plus, le dépôt du protocole au greffe doit s’effectuer dans un délai de 45 jours de la signification de l’avis d’assignation.
Dans la décision examinée, aucun protocole de l’instance n’a été déposé au greffe dans le délai imparti.
Ce qui est prévu dans la Loi : De plus, les parties doivent procéder à la mise en état du dossier dans un délai de six mois – délai dont la computation peut s’avérer parfois complexe – et ce afin d’obtenir l’inscription de leur dossier sur la liste des dossiers prêts à être entendus.
Dans la décision examinée, monsieur Légaré a déposé ladite demande dans le délai de rigueur de 6 mois. Cependant, le tribunal a indiqué que la demande s’est faite prématurément et irrégulièrement pour plusieurs raisons, notamment compte tenu du fait que le dossier n’était pas en état d’être entendu lors de l’inscription et du manque de collaboration avec la défenderesse.
Malgré ces irrégularités, monsieur Légaré avait-il un moyen de défense valable pour lui permettre d’aller de l’avant avec sa demande?
L’ignorance des règles de procédure n’est pas une excuse!
Les conséquences du défaut aux règles du Code de procédure civile sont très importantes! Faute de demander l’inscription pour instruction et jugement dans le délai imparti, le demandeur pourrait être présumé s’être désisté de sa demande. Le tribunal pourrait toutefois prolonger ce délai, mais uniquement si l’une ou l’autre des parties était en fait dans « l’impossibilité d’agir ».
Afin d’éviter les conséquences découlant des irrégularités procédurales, le demandeur a soulevé son ignorance des règles de procédure applicables comme moyen de défense. Le tribunal devait donc décider si l’ignorance des règles de procédure par monsieur Légaré, ayant décidé de se représenter soi-même, pouvait être qualifiée d’impossibilité d’agir. De l’avis du tribunal, une telle situation n’équivaut pas à une impossibilité d’agir. Monsieur Légaré ne pouvait invoquer son ignorance pour éviter les conséquences résultant des irrégularités de procédure.
Ainsi, le tribunal a appliqué la sanction de présomption de désistement de la demande effectuée par monsieur Légaré. Le juge a également ordonné la radiation de la proposition de protocole de l’instance déposé par la partie défenderesse, tout comme la demande d’inscription pour instruction et jugement déposée par monsieur Légaré, et ce en raison de leurs irrégularités.
Bref, en décidant de se représenter seul, le demandeur a subi les conséquences de son manque d’expérience et de son ignorance des règles applicables, ce qui lui a donc coûté sa demande!
Afin de respecter les règles de procédure et de vous éviter de lourdes conséquences dans votre processus judiciaire, faites appel à un avocat de Décarie Avocats qui vous accompagnera dans toutes vos démarches judiciaires, et ce dans le respect des délais de rigueur et conformément aux lois et règlements en vigueur. Notre expérience devant les tribunaux est une source d’excellence.
[1] Légaré c. Turcotte, 2018 QCCQ 9110