3 avril 2019

Votre entreprise… à l’abri d’un divorce ou d’une séparation?

Lorsque survient un divorce ou une séparation, tous souhaitent que les conséquences émotives et économiques de la rupture se règlent rapidement et à l’amiable. Toutefois, la réalité qui se cache derrière un divorce ou une séparation n’est pas toujours rose et ses conséquences juridiques peuvent avoir des ramifications qui s’étendent au-delà du droit de la famille. En effet, une séparation ou un divorce peut également avoir des incidences sur votre entreprise.

Il appert de statistiques récentes qu’au Québec[1], c’est environ 50% des couples mariés qui se séparent. La plupart des gens ne s’unissent pas en prévoyant leur séparation d’emblée, par contre, un minimum de prévention et de planification avant l’union peut éviter un éventuel litige. De plus, de cette façon, vous pouvez également assurer la pérennité de votre entreprise et avoir l’esprit tranquille en cas de séparation.

D’entrée de jeu, il est important de rappeler qu’au Québec, l’un des effets du mariage est la constitution du patrimoine familial et du régime matrimonial. L’entreprise de l’un ou des deux époux est un bien qui sera classé au sein du régime matrimonial.

Avant d’élaborer davantage sur l’impact juridique d’une séparation ou d’un divorce sur votre entreprise, il importe de distinguer les différents régimes matrimoniaux reconnus en vertu du droit québécois puisque chaque régime emportera des conséquences bien spécifiques sur le partage des biens des époux. Ainsi, pour déterminer si l’entreprise est incluse dans le régime matrimonial et la qualifier afin d’établir si elle pourrait être partageable entre les époux, il faut étudier le régime matrimonial applicable.

Les régimes matrimoniaux

La société d’acquêts, la séparation de biens et la communauté de biens sont les trois régimes matrimoniaux prévus par le droit québécois. À noter que la communauté de biens est un ancien régime qui tend à disparaître et qu’il n’est donc plus possible de se marier sous ce régime.

  • La société d’acquêts

La société d’acquêts est le régime matrimonial par défaut selon le Code civil du Québec, dans la mesure où les époux n’ont pas choisi leur régime matrimonial par contrat de mariage avant la célébration de leur union.

Sous ce régime, la loi reconnait deux catégories de biens : les biens acquêts et les biens propres. Sauf exception et récompenses pouvant être dues, le principe général est que les acquêts sont des biens partageables tandis que les biens propres ne le sont pas.

Peuvent notamment être qualifiés d’acquêts et de propres les biens suivants :

Acquêts : Produit du travail au cours du mariage, fruits et revenus échus ou perçus provenant de tous biens propres ou acquêts, immeubles acquis durant le mariage, entreprise constituée ou acquise durant le mariage;

Propres : Biens détenus avant le mariage, biens échus par donation ou succession durant le mariage, vêtements, papiers personnels, alliances, décorations, diplômes, instruments de travail nécessaires à la profession;

Il importe de préciser que le droit québécois reconnait le concept de récompense entre les propres et les acquêts ce qui signifie notamment que lorsqu’un bien pourrait être qualifié partiellement d’acquêts et à la fois de propre, des calculs doivent être faits afin de récompenser, soit de rétablir ce qui est dû à la masse des acquêts ou la masse des propres. Chaque cas étant distinct, il est donc préférable de consulter un professionnel de l’équipe de Décarie Avocats afin de déterminer si des récompenses peuvent être exigées.

  • La séparation de biens

Par contrat de mariage notarié, les époux peuvent opter de se soumettre au régime de la séparation de biens. Sous ce régime, chacun des époux conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de tous les biens du régime matrimonial dont il est seul propriétaire et ce, que les biens aient été acquis avant ou pendant le mariage. Chaque époux demeure également responsable des dettes contractées personnellement avant ou pendant le mariage.

Le divorce : pas sans conséquences pour votre société

Les notions de base de chacun des régimes matrimoniaux étant établies, dans un cas de divorce, que se passera-t-il avec votre entreprise?

Si vous êtes en instance de divorce et êtes soumis au régime de la société d’acquêts, votre entreprise acquise ou constituée durant le mariage sera vraisemblablement qualifiée de bien acquêts et pourra faire l’objet d’un partage avec votre épouse ou époux. Dans le cas d’une entreprise qui vous appartenait ou qui a été constituée avant le mariage, ou bien que vous auriez reçue par succession ou donation pendant le mariage, elle pourrait alors être qualifiée de bien propre et ne donnerait pas nécessairement ouverture au partage. Soyez toutefois conscient que les revenus acquêts investis dans une entreprise propre pendant le mariage pourraient faire l’objet d’une récompense et que les bénéfices non répartis (BNR) qui quittent le patrimoine de votre entreprise propre, tel qu’en vous versant des dividendes, pourraient alors être considérés comme des acquêts.

En somme, pour les entrepreneurs bien établis et ceux qui souhaitent se partir en affaire, la séparation de biens est souvent le régime matrimonial le plus avantageux. Sous ce régime, si vous faites l’acquisition ou constituez une entreprise pendant le mariage et que vous êtes le seul des époux à avoir participé à cette acquisition ou constitution, cette entreprise ne sera normalement pas partageable en cas de divorce. Pour vous soumettre au régime matrimonial de la séparation de biens, le Code civil du Québec prévoit que les époux doivent signer un contrat de mariage notarié avant la célébration du mariage ou pendant le mariage, pour ceux qui souhaitent modifier leur régime en cours d’union.

Et qu’en est-il de l’union de fait?

Au Québec, le concept de patrimoine familial et de régime matrimonial ne s’applique pas aux conjoints de fait. Ainsi, puisqu’ils n’ont pas de statut légal particulier prévu dans le Code civil du Québec, les conjoints de faits sont régis par les dispositions générales du droit civil. Ils n’ont pas d’obligation de partager les biens acquis personnellement pendant leur relation et les biens acquis conjointement seront soumis aux dispositions de la Loi, notamment celles relatives à la copropriété. Les conjoints de fait peuvent toutefois convenir de faire un contrat de vie commune établissant notamment certaines modalités de partage de leurs biens en cas de séparation. Les parties étant maîtres de leur contrat, il sera possible de prévoir certains droits et obligations, de même que des modalités de partage ou de compensation concernant l’entreprise d’un ou des conjoints.

Des répercussions importantes sur votre entreprise peuvent avoir lieu suite à une séparation ou un divorce et chaque cas se doit d’être étudié finement afin de déterminer vos droits et obligations. Afin d’être outillé pour assurer la pérennité de votre entreprise en cas de rupture, faites confiance à l’équipe de Décarie Avocats.

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[1] Institut de la statistique du Québec. «Banque de données des statistiques officielles sur le Québec – Mariages et divorces», [En ligne], http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/mariages-divorces/6p4.htm